La nuit était tombée depuis plusieurs heures. Du moins c’était l’impression que j’avais. La Lune, cet astre céleste, brillait en surplombant le pensionnat de son indécent et suave éclat. Et j’étais inéluctablement subjugué, fasciné par autant de somptuosité. Et le chatoiement futile de son reflet dans mes yeux semblait s’infiltrer dans le moindre recoin de mon corps, de mon âme offerte, de mon esprit embrumé et vacillant.

Je m’accoudai aux bords de la fenêtre close située devant moi, et lançai des œillades enflammées à cette Lune. Avant de soupirer longuement et de me retourner en fermant légèrement les yeux. Étais-je donc désespéré au point de faire la cour à un satellite ?

Mais elle, au moins, me comprenait. Elle savait ce que c’était d’être perdu quand tout autour de nous ressemble au néant. Comme ce ciel morose et mélancolique, dénué de toute étoile cette nuit-là, je ne pouvais vivre sans ma Lune. Et je m’enfonçais progressivement dans les abysses insondables de mes pensées contrites.

Je me détachais brusquement de la douce vision du croissant argenté. Qu’est ce qui clochait chez moi ?
Je me décidai enfin de partir loin de cette fenêtre -cette fenêtre qui me faisait apercevoir un morceau de cette liberté tant redoutée-, et errai sans but précis le long d’une pièce que j’identifiais comme étant un couloir.

Après avoir examiné le corridor sous toutes ses coutures, un léger murmure rythmé parvint à mes oreilles. Je relevai la tête, surpris, et arrêtai de divaguer sur les raisons de ma présence en ces lieux.

Un jeune homme se tenait devant moi. Je sursautai, ne l’ayant pas entendu approcher.

« Hep toi, attends. »

Je vrillai mon regard azur sur le sien et lui fis mon fameux sourire, timide et innocent, qui, apparemment, faisait craquer aussi bien les femmes que les hommes. Me collai le plus possible au mur, après tout il fallait que j’aie l’air gêné de vadrouiller dans les couloirs à une heure aussi tardive…

« E-Excusez-moi Monsieur… Je me suis perdu. » Soufflais-je en affichant une petite moue effarouchée.

Le rouge me monta aux joues sans que je comprenne pourquoi. Se pourrait-il que le personnage que je m’étais toujours efforcé de maintenir en dehors de la moite intimité de ma chambre soit devenu ma réelle attitude ?